Edmond-Hector Brosseau

Chaque année, de 1964 à 1967 l’Almanach Franco-Albertain publiait la biographie d’un Canadien-français qui a fait sa marque en Alberta. Une quarantaine de noms furent soumis pour l’édition de l’Almanach de 1964. Le choix tomba sur Edmond-Hector Brosseau, le premier marchand canadien-français dans cette partie des Territoires du Nord-Ouest qui deviendra plus tard l’Alberta.

Société historique francophone de l'Alberta

Edmond-Hector Brosseau

A75, Collection Héritage, Archives Saint-Jean

Edmond-Hector Brosseau est né à Laprairie, près de Montréal, le 7 octobre 1843 et douze ans plus tard, sa famille émigrait à Plattsburg dans l’État de New-York.

C’est en 1864, alors qu’il était âgé de 21 ans, que devait commencer la vie aventureuse du jeune Brosseau. Cette année-là, il s’enrôlait dans le régiment de New-York de l’Armée du Nord qui participait alors à la guerre civile. Il fit toute la campagne et fut licencié le 23 août 1865.

Mais la vie sédentaire n’était pas faite pour lui. Après son licenciement, il se rend en bateau de New-York à Colon où il entreprend de traverser l’isthme de Panama par la voie ferrée du Trans-Panama. À Panama, il reprend la mer pour se rendre en Californie. Là, ce sont les mines d’or qui l’attirent. Mais, dans ce genre d’exploitation, « il y en a beaucoup d’appelés mais peu d’élus ». Devant cet insuccès, le jeune Brosseau décide de rendre visite à son père Antoine Brosseau, installé depuis peu à Quesnel en Colombie Britannique avec sa soeur Philomène, Madame John Green.

En 1892, l’appel de la route se fait de nouveau entendre et Edmond-Hector entreprend le voyage le plus pénible de toute sa vie, de Quesnel au Lac-la-Biche, parfois en canot parfois à pied. Après avoir voyagé sur les rivières La Paix, Athabasca et La Biche, il arrive finalement au lac Bon Poisson. Là, il rencontre le maître d’école, Peter Erasmus, avec qui il veut échanger un peu de poudre d’or trouvée en Colombie pour une paire de mocassins. Mais Peter ne veut rien entendre : un blanc qui a le courage de traverser les Rocheuses de Quesnel au Lac Bon Poisson mérite bien des mocassins gratuits.

Au lac Bon Poisson, le jeune Brosseau séjourne quelque temps chez le rév. Steinhauer, un Indien, ministre méthodiste. Ce dernier acquiesce à sa demande et lui prête un cheval pour se rendre à Victoria, devenu depuis le hameau qui porte le nom de Pakan, à quelque 80 milles à l’est d’Edmonton. De Pakan, il se rend à Saint-Albert, après avoir passé par le fort Edmonton. C’est à Saint-Albert que nous le retrouvons en 1876, installé sur un « homestead » qu’il cherche à cultiver.

Cette année-là, il épousait Julie L’Hirondelle, veuve de Vanceslas Bruno : par ce mariage, il s’alliait aux meilleures familles métisses du pays, les familles Cunningham, Beaudry, Bellerose et Gagnon. Les deux premières devaient fournir les premiers prêtres métis à recevoir le sacerdoce des mains de Mgr Grandin. Edmond-Hector aimait à raconter qu’après le déjeuner de noce, servi par Mme Octave Mageau, soeur de la mariée, il endossa ses habits de travail et passa la journée à renchausser ses patates.

Trois ans plus tard, soit en 1879, la compagnie de la Baie d’Hudson fermait sa succursale de Saint-Albert et monsieur Brosseau décida de prendre la relève en établissant un commerce dans un petit coin du « Stopping Place » du patriarche Beaudry. Le succès ne se fit pas attendre et l’année suivante, il installait son commerce dans un édifice imposant qu’il avait fait construire à l’extrémité nord du pont de Saint-Albert. Il développa ce commerce durant vingt ans et en 1900, il vendait son magasin à MM Hébert et Perron.

Peu après, il succédait à M. Chénier comme associé de M. J.H. Gariépy et devenait co-propriétaire d’un magasin général connu à Edmonton sous le nom de Gariépy et Brosseau. Cette société devait être de courte durée car il vendait bientôt ses intérêts au futur sénateur P.-E. Lessard. Puis, il allait établir sa famille à 100 milles à l’est d’Edmonton à l’endroit même qui devait prendre son nom : Brosseau, Alberta. Là il se fit cultivateur, éleveur et marchand de chevaux ainsi que commerçant. En 1915, il devient rentier et se retire à Saint-Paul.

En 1917, il alla rendre visite à sa soeur à St-Paul au Minnesota. C’est là que la maladie le frappa et malgré les efforts des meilleurs chirurgiens de l’endroit, il mourait le 17 septembre à l’âge de 74 ans. Ses restes furent ramenés à Brosseau et reposent dans le cimetière de l’endroit, un terrain qu’il avait offert lui-même à la paroisse lors de sa fondation. Son épouse lui survécut jusqu’en 1935; elle était âgée de 92 ans. De ses quatre fils, deux, Joseph et Jean-Baptiste seront fermiers à Brosseau et deux autres, Edmond et Albert, seront commerçants.

Texte d’Alphonse Sylvestre
(adapté par France Levasseur-Ouimet)